Le terme « épilepsie » vient du grec « epilambanein, epilêpsia » : attaquer, prendre par surprise, action de saisir, de mettre la main sur quelque chose, attaque, interception, arrêt soudain.
Les médecins de l’antiquité disaient qu’elle tient son nom à ce qu’elle saisit à la fois le corps et l’esprit.
L’altération de la conscience et l’épilepsie entretiennent une relation ancienne.
Pendant longtemps, et parce que les crises sont tellement impressionnantes, on a considéré les épileptiques comme des personnes possédées par le démon, sous l’emprise d’une malédiction divine puis, comme des fous.
Ce n’est qu’au milieu du XIXe siècle, à travers les travaux du professeur américain William Lennox apportant la première approche scientifique de la pathologie, que l’épilepsie n’est plus considérée comme une maladie mentale. Elle appartient au domaine de la neurologie et son étude concerne l’épileptologie.
Isaac Newton, Molière, Napoléon, Gustave Flaubert étaient atteints d’épilepsie.
L'épilepsie est une maladie dont le principal symptôme est la crise épileptique.
La crise est le résultat symptomatique de décharges électriques soudaines, excessives et à la même fréquence d’une population de neurones dans le cerveau.
La décharge peut être localisée ou concernée l'entièreté du cerveau. Ce sont les électroencéphalogramme (EEG) qui permettent d’identifier le point de départ de la crise, le centre épileptogène (CE). En fonction de la localisation du CE dans le cerveau, les symptômes seront moteurs, sensitifs ou cognitifs. Il peut y avoir aussi une altération de la conscience.
Ainsi, les crises localisées au niveau du lobe frontal, siège de la raison et de l’aire motrice, induisent préférentiellement des mouvements incontrôlés des membres inférieurs et/ou supérieurs avec clonie, hypertonie, et parfois des troubles de la parole.
Tandis que, les crises localisées au niveau du lobe pariétal se manifestent par des troubles sensitifs tels que des picotements, paresthésies et anesthésies.
Les crises localisées au niveau du lobe occipital, siège de l’aire visuelle, se manifestent par des hallucinations visuelles pouvant aller jusqu'à une cécité visuelle transitoire.
Enfin, les crises localisées au niveau du lobe temporal induisent des symptômes plus vastes avec des hallucinations auditives mais aussi des sensations de «déjà-vu», d'anxiété accompagnées d’automatismes incontrôlés oraux et des membres supérieurs. Ces dernières sont les plus courantes et sont appelées aussi crises partielles complexes (voir plus loin).
C’est pour cela qu’il est plus juste de parler «des épilepsies», ou de syndromes épileptiques, que de l’épilepsie.
Les syndromes épileptiques sont classifiés selon deux axes principaux:
Les crises épileptiques
Les causes
L'étape de classification est une étape essentielle dans la prise en charge des personnes épileptiques, car elle permet aux professionnels de santé de déterminer un pronostic et de choisir le traitement.
L’âge de début est aussi un critère important pris en considération.
Les crises épileptiques
La plupart du temps, en dehors des crises, la personne qui souffre d’une épilepsie ne manifeste aucun signe extérieur particulier.
L’épilepsie a cela de particulier que la personne n'est réellement malade que quelques secondes à quelques minutes par semaine, par mois ou même par année mais, elle ne sait pas quand une crise va survenir. Même si elle ne fait que peu de crises, elle est en permanence sous la menace d'en faire et est, de ce fait, en permanence épileptique.
La fréquence des crises épileptiques est très largement variable d’une personne à l’autre.
Des personnes peuvent avoir 50 à 100 crises par jour tandis que d’autres n’en feront qu’une fois par an ou tous les 2 ans.
Parmi les crises épileptiques on distingue les crises généralisées et les crises partielles:
- les crises généralisées affectent l'entièreté du cerveau
les crises tonico-cloniques (auparavant appelées le « Grand Mal ») correspondent aux crises les plus spectaculaires et auxquelles les personnes assimilent l’épilepsie de manière générale. La crise tonico-clonique est caractérisée par une convulsion au cours de laquelle le corps de la personne se raidit, les bras se tendent, les jambes, la tête et le cou s’étendent, et les mâchoires se serrent; il s’agit de la phase « tonique ». La personne tombe par terre, parfois en poussant un cri rauque, et perd conscience momentanément pendant quelques minutes. Durant cette phase, la respiration devient difficile ou s’arrête, le corps a des soubresauts, la salive peut s’accumuler dans la bouche et la vessie peut se vider. Il s’agit de la phase « clonique ». Finalement, les mouvements saccadés diminuent et la personne recouvre la conscience, quelque peu désorientée et épuisée par l’intense activité musculaire. Ces crises durent quelques minutes, moins de 5 min.
les absences (auparavant appelées le « Petit mal ») : correspondent à une crise généralisée spécialement présente chez l’enfant de 3 à 14 ans. En fait, la forme de la crise d’absence apparaît considérablement plus faible que la crise tonico-clonique; elle passe souvent pour un rêve éveillé. Ainsi, elles sont difficilement repérables. Souvent, l’instituteur d’école primaire remarque le trouble avant toute autre personne. Les absences se caractérisent communément par une brève perte de conscience avec le regard fixe, les yeux qui clignent ou qui roulent vers le haut. Il n’est pas rare pour un enfant d’avoir 50 à 100 crises d’absence par jour. Cette forme d’épilepsie disparaît généralement à la puberté chez la plupart des enfants.
les crises myocloniques sont décrites comme des soubresauts ou des tressaillements du corps dans un muscle ou un groupe de muscles; elles sont généralement brèves, durant normalement seulement deux secondes. Alors que des personnes non épileptiques peuvent souffrir de myoclonie, dans les épilepsies myocloniques, les crises causent habituellement des mouvements anormaux des deux côtés du corps simultanément.
les crises toniques sont caractérisées par la soudaine contraction et le raidissement des muscles. Souvent, les yeux de la personne peuvent rouler en arrière et comme les muscles de la poitrine se durcissent et se raidissent, la respiration peut devenir encore plus difficile. Ces crises sont de courte durée, généralement moins de 20 secondes.
les crises atoniques durant lesquelles, les muscles perdent brusquement leur tonicité (ou force). Bien que l’individu reste conscient et que les crises elles-mêmes ne causent aucun mal au corps, des blessures indirectes peuvent souvent survenir en raison de chutes dues au manque de contrôle musculaire. Les crises atoniques sont quelquefois appelées « effondrements épileptiques » ou « crises avec chute ». Ces crises sont brèves et durent généralement 15 secondes ou moins. Les crises atoniques commencent dès l’enfance et continuent jusqu’à l’âge adulte.
- les crises partielles (ou focales) affectent une partie spécifique et localisée du cerveau. On distingue les crises partielles simples et complexes:
Les crises partielles dites simples car il n’y a pas d’altération de la conscience: La crise partielle simple peut précéder une crise partielle complexe, et ces cas-là sont souvent appelés « crise aura ». Les auras sont souvent caractérisées par une brève gêne dans l’estomac ou la tête, comme un sentiment d’affaissement ou d’élévation, un son de bourdonnement, une odeur déplaisante, ou des taches devant les yeux. Les individus qui peuvent apprendre à reconnaître le commencement d‘une crise d’épilepsie avant qu’elle ne s’étende à d’autres parties du cerveau peuvent l’utiliser comme un signal d’alarme, leur permettant de prendre des mesures protectrices empêchant de possibles blessures durant la crise elle-même.
Les crises partielles dites complexes car une altération de la conscience est observée. La crise partielle la plus courante est celle qui est maintenant appelée partielle-complexe et connue auparavant comme épilepsie du lobe temporal ou psychomotrice. La crise partielle-complexe est divisée en trois phases courtes : la personne arrête son activité et prend une expression hagarde et fixe. Puis commence un schéma de comportement automatique et sans but qui dure typiquement quelques minutes. Un tel comportement peut inclure le claquement des lèvres, tirer sur ses vêtements, les boutonner et les déboutonner ou tirer sur ses doigts. Quand la personne recouvre la conscience, une courte période de désorientation et de confusion survient.
Il se peut qu'une décharge localisée progressent vers une crise généralisée cependant ce type de crise est considérée tout de même comme étant partielle.
Les causes
Sont distinguées les causes idiopathiques (sans origines connues ou origines présumées génétiques) des causes non idiopathiques.
Pour les causes d'origine présumées génétiques, une équipe de l'Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM) à Paris, a découvert en 2013 qu’une mutation du gène DEPDC5 du chromosome 22 était impliquée dans la faculté de "fabriquer" une épilepsie partielle dite "focale".
Parmi les causes non idiopathiques, il y a:
- les causes lésionnelles :
tumorales représentant 10 à 15% des épilepsies adultes et sont rares chez les enfants
vasculaires, c’est à dire issues d'accidents ischémiques et hémorragiques, malformations vasculaires suite à un AVC
traumatiques, traumatismes crâniens
infectieuses (concernent tous les âges), encéphalites, méninge-encéphalites, abcès cérébraux, neurocysticerose (zones tropicales)
anomalies du développement cortical (erreur de migration des neurones), qui sont parmi les causes les plus fréquentes et induisant des épilepsies pharmaco-résistantes, de gravité variable pouvant débuter à n’importe quel âge. Selon le type de la malformation sont retrouvés ou non un retard mental. La forme la plus fréquente est la dysplasie corticale focale qui survient pendant la période embryonnaire ou après la naissance.
- les causes toxiques :
l’alcool : en prise excessive et inhabituelle d’une grande quantité, durant le sevrage absolu ou relatif chez un éthylique chronique, l'épilepsie alcoolique (crise peu fréquente souvent généralisées.
autres drogues ou toxiques dont cocaïne, amphétamines, intoxication par le plomb, le manganèse, les organophosphorés.
médicaments comme la prise de psychotropes (sans surdosage, par surdosage ou par sevrage) et certains médicaments convulsants.
- les causes métaboliques
comme les hypoglycémies, les hyperglycémies, l’insuffisance rénale (engendrant principalement des myoclonies), un déficit en vitamine B (en particulier chez le nouveau-né).
Statistiquement, les épilepsies généralisées représentent environ 35% des épilepsies et sont le plus souvent sans origines connues ou présumées d’origine génétique. Tandis que les épilepsies partielles sont les plus fréquentes (65%) et secondaire à une cause lésionnelle le plus souvent .
Conclusion
Les complications à long terme de l'épilepsie peuvent être sévères :
aggravation des crises (répétition, traitement et cause de l’épilepsie)
retentissement psychologique et social (nous verrons dans un prochain article qu'effectivement l'épilepsie, c'est davantage que les crises)
état de mal épileptique (crise épileptique persistant de manière prolongée au-delà de dix minutes ou qui se répète suffisamment pour empêcher une reprise de conscience entre les épisodes)
accidents (traumatismes physiques résultants)
la mort subite inattendue et inexpliquée en épilepsie (SUDEP) représente la plus dramatique des conséquences de l’épilepsie et malgré l’importance des recherches de nombreuses questions persistent encore aujourd’hui tant sur les mécanismes et facteurs de risque que sur les moyens de prévention et la conduite à tenir face aux patients et leurs proches. L’impact en santé publique des SUDEP est important puisqu’elles propulsent l’épilepsie en seconde position parmi les grandes pathologies neurologiques en termes de nombres d’années potentielles de vie perdues
Globalement le risque de mourir est augmenté de 28 fois par la présence des crises, que ce soit accidentellement, par mort subite, par suicide.
L’épilepsie présente un risque de «mortalité accrue», il est urgent de trouver un traitement.
La quête d’un traitement supportable, peu coûteux et efficace s’avère difficile pour les patients et médecins traitants.
Nous verrons dans un prochain article les traitements actuels de l'épilepsie.
Sources
Collège des enseignants de neurologie (https://www.cen-neurologie.fr)
INCR – Institut des Neurosciences Cliniques de Rennes (https://www.incr.fr)
Pratique neurologique- FMC Vol10,n°2 avril2019_ M.-C. Picot
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